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que les mouvements qui correspondent au son, à la lumière, ont passé du monde extérieur dans l’organisme et dans le cerveau. Helmholz croit qu’il y a dans l’oreille un certain nombre de diapasons qui vibrent chacun à un son déterminé, et à celui-là seulement ; et nous n’entendons que dans la mesure où les diapasons de l’oreille correspondent aux sons extérieurs. Il y aurait de même dans l’œil, selon Young, des bâtonnets optiques correspondant à des couleurs déterminées, c’est-à-dire à des vibrations déterminées. D’ailleurs, comment imaginer que la matière vivante, éminemment plastique, a pu être soumise, depuis l’origine de la vie, à l’action incessante, mécanique des ondes et des vibrations, sans s’y conformer et s’y adapter ? Les différentes ondes sonores correspondant à l’échelle des sons diffèrent entre elles par leur rapidité. Puisque la conscience perçoit des sons différents, il faut bien que les mouvements cérébraux auxquels correspondent ces sensations différentes soient différents aussi. Il est bien vrai que les mouvements cérébraux correspondant aux sons pourraient différer entre eux, sans être conformes pour cela aux différentes ondes sonores. Mais il est infiniment plus simple d’admettre qu’il y a conformité de ceux-ci à celles-là. Les rapports de sons que nous trouvons agréables et justes correspondent à des rapports numériques simples entre les ondes sonores, et ce n’est point là un rapport accidentel. Il y a évidemment harmonie de la simplicité et de la beauté. Il faut donc que les mouvements cérébraux aient entre eux, comme les ondes sonores, des rapports numériques simples. Il devient de plus en plus vraisemblable que ces rapports sont les mêmes que ceux des ondes sonores extérieures entre elles. De même les couleurs et toutes les nuances des