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raîtra à lui-même comme un point de vue particulier de la conscience terrestre ; et, habitué à sentir en lui-même l’action d’une conscience plus vaste que la sienne, mais qui tout en le dépassant le pénètre, il comprendra sans peine ce qu’est la conscience absolue et divine qui est le principe vivant de toute unité de conscience secondaire et le terme idéal auquel toutes ces consciences aspirent en s’élargissant. Ainsi, le moi humain porté aujourd’hui par un organisme particulier repose dès maintenant sur une base trop étroite. Notre petite individualité organique ne peut plus porter notre âme avide d’infini et habituée à l’infini. Notre corps ne peut plus porter notre cerveau.

Notre moi cherchera, pour s’y appuyer, un organisme plus vaste ; notre cerveau cherchera un corps plus puissant et ce corps puissant ce sera la terre, dont il sera, associé aux autres cerveaux, l’organe proportionné. Ce qui montre bien que notre organisme comme tel est devenu accessoire, c’est que cette révolution inouïe dans la nature humaine pourrait s’accomplir sans que l’organisme extérieur fût modifié. Les phénomènes magnétiques et hypnotiques se manifestent dans l’homme, sans que son organisme visible soit altéré. Dès lors, l’homme actuel pourra s’annexer les puissances nouvelles que l’hypnotisme découvre, sans modifier en rien son enveloppe organique. La pénétration plus grande du regard, la puissance d’attraction magnétique, la communication immédiate de cerveau à cerveau, tout cela est possible sans un changement quelconque dans la forme extérieure de la vie.

Quoi qu’il en soit de ces rêves, il est certain que dans l’ordre du mouvement, de la pensée, de l’émotion, de la rêverie, l’âme dépasse son organisme. Par la