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fonction concordante dans le système un de la réalité.

Au surplus, Kant lui-même est amené, par la force même des choses, à rapprocher par des analogies la sensibilité et l’entendement. C’est ainsi que, dans le chapitre relatif au schématisme de l’entendement, Kant distingue l’image, le schème et le concept. Par exemple, le concept du triangle, c’est l’idée pure de ce triangle, celle qui convient à tous les triangles possibles. L’image du triangle, c’est tel triangle particulier tracé sur un tableau. Mais les actes de l’esprit ne portent ni sur le concept pur, ni sur l’image. L’esprit ne peut connaître vraiment le triangle qu’en le construisant ; or, il ne peut pas construire un concept pur. Quand il tire une ligne dans l’espace par l’imagination, ce n’est pas la ligne. D’autre part, le triangle particulier, qui constitue une image, n’est point précisément, parce qu’il est particulier, l’objet du travail de l’esprit. Entre l’image et le concept, il y a le schème qui participe à la fois de l’image et du concept, de la sensibilité et de l’entendement. Lorsque nous méditons intérieurement sur le triangle, nous donnons à l’idée du triangle par l’imagination certaines déterminations sensibles, qui ne se réduisent pas pourtant à la particularité de l’image. Le schème établit une communication entre le concept et l’image, c’est par lui que l’image participe aux caractères essentiels du concept. Or, dans les exemples qu’il donne de cette merveilleuse liaison de l’entendement et de la sensibilité, Kant dit que l’espace est l’image de la quantité. J’avoue que je ne saisis plus, dès lors, comment l’espace peut être une forme purement subjective et humaine, étant en même temps l’image d’une catégorie qui a une valeur universelle. Bien que l’image ne soit pas adéquate au concept, il y a rapport de