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vie indépendante et toute divine ; ils ont oublié qu’elle émanait de foyers distincts, et que ces foyers ayant leurs particularités, la marqueraient dans la lumière : ainsi le spectre du soleil ne serait point sans doute identique au spectre d’une autre étoile ; ils ont ignoré aussi que la lumière était le rayonnement des particules incandescentes des gaz qui constituent l’atmosphère du soleil ; et que, par suite, elle impliquait des individualités astronomiques et chimiques. La lumière est impondérable, et elle n’a aucune détermination chimique : mais elle suppose l’action de la matière pesante organisée et spécifiée sur l’éther ; celui-ci, laissé à lui-même, serait le transparent à l’état de puissance : il ne serait jamais la clarté ; il est vrai que les gaz n’arrivent à l’incandescence qu’après avoir absorbé beaucoup de chaleur et que cette chaleur est déjà un mouvement de l’éther, si bien que la matière pesante et individualisée servirait seulement d’intermédiaire entre un mouvement de l’éther et un autre mouvement de l’éther ; elle lui prendrait son énergie sous forme de chaleur et la lui rendrait sous forme de lumière ; mais ces mouvements calorifiques de l’éther, à leur tour, quelle en est la source ? N’est-ce pas dans des combinaisons ou décompositions chimiques ? Et ainsi nous serons incessamment ramenés dans un cercle sans pouvoir trouver, ni dans l’éther ni dans les corps, la source première et exclusive de la lumière et de la chaleur. Il faudra donc convenir que ni l’identité universelle de l’éther, ni la particularité des corps pesants ne se suffisent ; que l’universel et le particulier n’entrent en acte que par leur action réciproque. Ainsi, nous retrouverons, à l’origine du rayon, ce que nous constatons à son introduction sur notre planète : la rencontre et le conflit fécond de l’impondérable