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à une forme de mouvement qui exprimât immédiatement l’être, et qui fût la base de toutes les autres formes, soit, au contraire, qu’il n’y eût pas une forme fondamentale et première du mouvement, et que l’être fût présent à toutes les formes, et, si l’on peut dire, à tous les degrés du mouvement. Mais maintenant nous savons que les différentes formes de mouvement qui correspondent au son, à la résistance, à la lumière, à la chaleur, sont des fonctions distinctes et irréductibles de l’être : toutes donc reposent immédiatement sur l’être. Le monde n’est pas construit en étages, ou, si l’on veut, sa base divine, qui est l’être, est comme présente à toutes ses hauteurs. Puisque la lumière, comme idée, ne peut être déduite de la chaleur ou du son, le mouvement qui exprime la lumière est indépendant de toute autre forme de mouvement. Lorsque la lumière communique sa forme propre à l’éther, l’éther a beau, sur le trajet même de la lumière, être animé d’autres mouvements correspondant à d’autres fonctions ; la lumière ne se mêle pas à ces autres mouvements, elle n’en dépend pas ; elle ne se sert pas d’eux pour se rattacher à l’être : elle en manifeste, sans intermédiaire, un aspect défini. L’éther immense est travaillé par tous les mouvements d’attraction et de répulsion qui maintiennent le vivant équilibre des mondes ; mais cela ne trouble pas le rayon de lumière qui le traverse : l’attraction reste l’attraction, la lumière reste la lumière ; la même immensité subtile accomplit des fonctions distinctes sans les brouiller, comme un esprit lumineux et vaste poursuit à la fois, sans les confondre, des desseins variés.

Il ne faut donc pas chercher quelle forme de mouvement est plus profonde et plus fondamentale que telle