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infini qui l’a fondée, justement parce qu’il était l’acte infini, c’est-à-dire la pensée absolue. C’est parce que la vivante unité de Dieu, qui n’est pas seulement l’objet de la pensée, qui se confond avec la pensée elle-même, pouvait se retrouver et s’affirmer dans l’indéfini de la puissance, que l’indéfini de la puissance s’est déroulé. L’être considéré comme substance et comme puissance est donc un effet et comme une manifestation de la pensée vivante. Ainsi, la substantialité du monde n’ôte rien à son idéalité. Nous nous garderons bien de dire que c’est l’être considéré comme puissance permanente et indéfinie qui sert de base à l’acte divin et à l’évolution divine : non, c’est l’acte divin qui convertit en puissance d’être, c’est-à-dire en être, ce qui n’était qu’une possibilité infinie d’existence ; c’est le sommet qui, par attraction, soutient la base. Mais alors, pourquoi éliminer, comme réfractaire à la pensée, la puissance substantielle de l’être ? L’être est à la fois, et par une liaison intelligible, puissance et acte, quantité et qualité, matière idéale et forme, étendue et action.

Il est donc légitime de considérer le mouvement au point de vue de la quantité, et on peut même dire que la forme du mouvement perdrait toute valeur, si elle ne représentait pas une quantité d’être permanente et indestructible. En effet, quand un mouvement d’une certaine forme se heurte à d’autres mouvements, il se combine avec ceux-ci, c’est-à-dire qu’il perd sa forme propre. Il ne la perd pas absolument, car elle se retrouve comme élément dans la forme nouvelle du mouvement résultant. Mais si cette forme ne représentait pas une quantité donnée et permanente, elle pourrait être réduite, dans la combinaison, à une quantité infinitésimale et