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Silène de Rubens : il est ivre, et deux Faunes, sortis des profondeurs du bois, le soutiennent et l’emmènent en riant ; son corps gras et blanc semble vraiment, suivant le mot de Virgile, enflé d’un vin choisi ; sa tête, légèrement inclinée, sourit avec une sorte de malice heureuse. On sent que son corps, si plein et si gras, est resté alerte et que, dans sa tête, où fermente une douce ivresse, pourraient s’allumer soudain et jaillir en éclairs les grandes chansons inspirées sur l’origine du monde et de la vie, sur cette fermentation première des choses qui ressemble, elle aussi, à une ivresse.

Mais ce qui captive le plus, c’est la collection à peu près complète des œuvres de David d’Angers. Quelle variété et quelle largeur ! et, dans cette œuvre même, il est impossible de ne pas s’attacher longuement à ces têtes de paysans vendéens qui ont combattu avec Cathelineau, Bonchamp et Charette, et que David a crayonnées. Toute l’histoire du mouvement vendéen est dans ces figures de paysans, fines, sévères et tristes.

David, qui savait si bien comprendre et traduire l’enthousiasme, n’a animé ces figures d’aucun rayon chevaleresque. Et, à vrai dire, ces paysans de la Vendée furent des héros, mais non point des chevaliers. Ce n’est pas surtout par dévouement à leur noblesse décimée, à leurs curés proscrits qu’ils se soulevèrent. Ils étaient troublés, par la conscription, par un culte