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Faure n’effaceront point cela ; bien mieux, on peut affirmer sans paradoxe que c’est surtout Guillaume II qui se réjouira des marques d’amitié données à notre président par le tsar. Avant tout, Guillaume II voudrait désarmer les souvenirs et les revendications de la France ; il voudrait l’annexer à sa politique intérieure et extérieure : lutte contre le socialisme, lutte contre l’Angleterre ; il ne peut pas négocier directement avec la France : il a besoin, pour l’attirer à lui sans scandale, de l’intermédiaire de la Russie ; et plus la Russie prodiguera à la France les témoignages d’amitié, plus la France badaude permettra à ses gouvernants de l’engager à fond dans la politique russo-allemande. De plus, le tsar et Guillaume espèrent que les rivalités de la France et de l’Angleterre, au Siam, à Madagascar, en Égypte, précipiteront la France dans une politique anti-anglaise ; et alors, la Russie, l’Allemagne, la France formeront une ligue continentale ayant pour but de restreindre la puissance économique et coloniale de l’Angleterre, et d’organiser partout la résistance contre la Révolution.

Certes, s’il ne s’agissait que du capitalisme anglais, si envahissant et si peu scrupuleux, s’il ne s’agissait que des aventuriers à la Cecil Rhodes et à la Jameson, ou des méthodistes, leurs complices, nous n’aurions qu’un médiocre souci. Mais au profit de