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mais à Breslau, chez Guillaume, mais à Balmoral, dans le château d’été de la reine d’Angleterre, est-ce qu’il sera sur le sol russe ?

La vérité, c’est que, tout en venant chez nous, il entend se livrer le moins possible et marquer les distances. Le Figaro a, dès le début, recommandé de réduire au minimum les manifestations populaires et de donner à la réception du tsar une sorte de discrétion aristocratique ; et dès le lendemain, il livrait son secret : « Nous savons, disait-il, que nous traduisons ainsi la pensée de nos hôtes : ce qu’on redoute, c’est l’excès de l’enthousiasme. » Pressez-vous donc, travailleurs de Paris, sur le passage du maître auguste, et laissez-lui voir la dévotion de vos âmes ; mais « ayez de la tenue » — c’est encore le mot du moniteur officiel du tsar — ; surveillez vos gestes et vos cris ; car vous risqueriez d’encanailler la fête et de compromettre aux yeux de son frère de Berlin l’autocrate russe. C’est bon pour notre Félix Faure, quand il accompagne M. Bourgeois dans le Midi, d’être un peu bousculé par les acclamations populaires : il faut plus de ménagements à la majesté de l’autre ; et la rue elle-même doit avoir des enthousiasmes de salon ; c’est par ses bonnes manières que la République gardera la haute amitié dont on l’honore ; et le tsar pourra parler sans trop d’embarras, aux autres souverains de l’Europe, de ses relations avec nous : « C’est, je vous