de l’attachement qui existe entre Berryer et Mme de T...,
C’est un pur platonisme, assaisonné de coquetterie. »
Et comme je prenais une physionomie dubitative, en
ajoutant: « Mais elle est veuve maintenant ; ne faut-il
pas tenir compte de cette liberté nouvelle ? »
Il me fut répliqué:
«Chère Elma, nous en parlerons dans quelques jours.
Des visiteurs sont attendus, et d’ici-là, vous ne serez en
tiers que si vous le voulez bien. Comme toujours, notre
Richomme est à vos ordres. Il me remplacera quand
vous le demanderez, très flatté de l’honneur que vous
lui ferez. Quant à moi, mon amie, vous savez que ma
paresse s’oppose aux promenades, ainsi que ma santé
aux veillées du soir il faudra m’excuser.
L’intérieur de Berryer paraîtrait incomplet si l’on n’y
retrouvait la figure de son fidèle Richomme, qui avait
débuté dans la même étude d’avoué que lui, tous deux
clercs et compagnons de plaisir. Celui qui avait illustré
son nom vint en aide, plus tard, au camarade demeuré
obscur et sans fortune.
Une déraison pleine de comique, des lueurs de bon
sens et de sensibilité, une gaieté inaltérable avec un grain
de malice, tel était l’hôte admis au foyer de Berryer,
sans que jamais il pût sentir que la main qui donne est
au-dessus de celle qui reçoit.
Le lendemain même de l’arrivée, nous suivions en promenade
le cours de l’Essonne, jolie rivière qui traverse
le parc d’Augerville dans toute sa longueur; nous admirions
les beaux peupliers dont ses eaux baignent les
pieds, et que le propriétaire entourait amoureusement
de ses bras pour constater leur développement, quand
Richomme, pris d’un subit enthousiasme, s’écria:
« Que dira-t-on un jour, quand Berryer ne sera plus, et que je raconterai aux promeneurs que je suis venu là, à cette place même, avec le grand orateur ? On me ques-