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« Enfin, c’est vous, cher ! Attendre ainsi, c’est à mourir ! »

cc Je ne distinguais d’abord qu’une sorte de chapeautoque, sur lequel se mêlaient aux plumes des fleurs artificielles puis, dessous, cette petite figure peinte que vous savez elle paraissait assise très bas, et devenue comme le centre d’un flot de mousseline blanche. Je cherchais en vain à me rendre compte de ce qui était mouvant sous mes yeux. Je suppose que ma physionomie exprimait l’étonnement, car tout d’abord la dame me dit:

« Ne faites pas attention, cher ! c’est pour calmer mes nerfs, l’attente me rend si malade.

—Qu’est-il donc arrivé, madame, que voulez-vous de moi ?

—Ne le devinez-vous pas ? N’avez-vous donc pas lu au Moniteur, ce matin, les nouvelles nominations dans la diplomatie ? Deux paltoquets, cher ami: l’un, premier secrétaire d’ambassade, l’autre, ministre au Pérou ? Des gens sans aveu, d’une roture évidente, ne pouvant fournir que des noms de calendrier. Ce gouvernement prétend nous avilir. J’écrirai à M. le marquis de donner sa démission comme ambassadeur, et nous la motiverons. J’écrirai au roi, et vous lui porterez la lettre, cher. Oui, vous la porterez !

La marquise, en ce moment, se livrant à des gestes désordonnés, un bruit de clapotement me révéla le secret que j’avais vainement cherché à pénétrer jusquelà la marquise prenait un bain de siège. Elle agita une sonnette, une antique Mariette parut.

« Vite de l’eau chaude ! demanda-t-elle, le bain se refroidit. »

Puis, la colère de cette singulière personne s’exhala de nouveau en propositions folles. L’effet du bain me paraissait peu calmant. J’imaginai de renchérir sur son excentricité, l’engageant à demander une audience à Sa