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du rêve, que cet azur admirable était l’apanage de l’être à un seul ventricule.

Mémorant des ontogénies, il vit des fœtus conservés, assis sur le renflement de nasse des vases de cristal, le cœur schématique dans leur poitrine transparente ; et des nouveau-nés morts avant la deuxième semaine, dont le cœur, comme celui des fœtus, unissait ses deux oreillettes par la persistance du trou de Botal. Et malgré l’alcool dissolvant, on se souvenait d’ombre bleuâtre, comme de kohl, à la pulpe de leurs doigts, à leur sexe et à leur paupière supérieure.

Sous la caféine, sa langue était blanche et bruissante comme une route de neige récente.

Sa main appliquée sur son cœur écoutait le frémissement cataire ; sa main était froide sur sa poitrine moite, ses pieds exsangues ; et il rêvait qu’il souf-