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LES SILÈNES

Théophilot (grimpant après le Maître d’École halluciné). — Méchant Maître d’École ! Tu m’as battu, tu m’as fessé, tu m’as injurié ! Je suis saoûl ! Je te bats à mon tour ! Je te fesse !

Le Maître d’École. — Ô mon très vénéré père ? Pardon ! Je ne puis rien autre chose : épouser Karl ou mourir ! Ne soyez pas si sévère, ô plus vénérable des pères ! Je vous le demande à genoux, ne soyez pas si sévère pour votre fille infortunée ! « Pardonnez-moi, monsieur ! »

Monroc. — Oui, monsieur le Baron, pardonnez-nous, n’empêchez pas notre bonheur temporel et éternel !

(Théophilot roule par terre.)

Le Maître d’École (Joyeux). — Victoire ! Victoire ! Il pardonne, il roule par terre ! Karl, dans mes bras ! Nous pouvons nous aimer !

Monroc (regardant Théophilot). — Si je regarde monsieur votre père de plus près, il me paraît être devenu tout d’un coup terriblement petit.

Le Maître d’École. — Il a eu la rougeole, mon cher !

Monroc. — Hou, hou !

Le Maître d’École. — Dieu, pourquoi soupires-tu ?

Monroc. — Malheur, malheur ! J’ai peur de tomber sous la table !

Le Maître d’École. — Alors il n’y a rien à te conseiller que de te monter dessus.

(Monroc monte sur la table, pour ne pas tomber, et roule dessous).

Le Maître d’École, (poussant un grand cri et se frappant les mains au-dessus de la tête). — Ô destin, destin, inflexible destin ! Aucune prudence humaine n’a pu te prévenir, aucun mortel t’échapper ! En vain Monroc monte sur la