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LES SILÈNES
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ne vivais plus, je nageais dans un nuage, noyé du foutre que je lâchais sans arrêt.

Mort-aux-Rats. — Tu commences de me rendre la queue passablement belle avec tes récits.

Le Maître d’École. — Et vois cela m’émeut encore. N’est-il rien de mieux, ni de plus doux qu’un souvenir ?

Puis elle me donna encore une fois une vigueur nouvelle, mais pour varier un peu, elle s’étendit sur le dos, couvrit sa robe et me plaçant la queue entre ses seins qu’elle tenait rapprochés et serrés, elle m’engagea à opérer par petites secousses. Le voyage fut cette fois un peu plus long, j’avais déjà fourni un bien long trajet ; je m’attardai quelque temps entre les calebasses que m’offrait la gouge, laquelle du même pas me suçait délicieusement le nombril. Enfin, au mouvement de mes cloches, je sentis que l’heure des vêpres approchait, et j’inondai la poitrine de ma belle d’un torrent d’eau amidonnée dont elle reçut quelques bouillons dans la figure. Quel frémissant, quel miraculeux spectacle ! On eût dit les chutes du Rhin devant Schaffouse.

Monroc. — Ah ! quelle belle leçon tu nous donnes ! Que n’ai-je encore l’âge d’aller à tes cours !

Mort-aux-Rats (déjà ivre). — J’imagine que ma chemise doit en prendre, mais je ne sais ce que je lui verse : ou si j’urine, ou si je fous !

Le Maître d’École. — Nous nous levâmes ensuite, agréablement rompus, et sous la lune molle d’avril nous cheminâmes enlacés dans les quartiers endormis de Hambourg où nul témoin ne venait nous déranger. Seuls, les fenêtres, les œillets des volets peints en vert assistaient à nos caresses. J’avais une main entre les fesses de ma compagne et celle-ci s’était à nouveau em-