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LES SILÈNES
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poing de sa femme le faisant par trop souffrir. Pour ce qui concerne ma petitesse, il lui est arrivé la même chose qu’au père Homère, — depuis deux ans, je n’ai pas goûté à un rôti de porc.

Monroc. — Et, qu’est-ce donc qui vous fait croire que le vieil Homère ne mangeait pas de rôti de porc ?

Le Maître d’École. — Parce qu’il le décrit avec un tel art, monsieur Monroc.

Monroc. — Il faut donc que vous décriviez bien mal l’eau-de-vie ?

Le Maître d’École. — Non pas l’eau-de-vie, mais la vertu !

Monroc. — C’est qu’il n’y a pas de règles sans exceptions ! Mais répondez-moi ! En quel état se trouvent les choses au château ? Mademoiselle Liddy est-elle toujours joyeuse ?

Le Maître d’École. — Un ramoneur vient d’arriver au château, un ramoneur qui prétend être un surintendant général, et qui semble avoir déjà spéculé quinze jours avant sa naissance sur la perte de sa vertu.

La bonne humeur de mademoiselle Liddy et la mauvaise humeur de son oncle sont au statu quo.

Monroc. — Voici 20 condoms pour cette bonne nouvelle ! Je les ai achetés d’un Juif qui ne pouvait s’en débarrasser autrement et ne sais plus quel usage en faire. (Il sort).

Le Maître d’École. — Des condoms ? Qu’est-ce que c’est ça ? Que pourrai-je donc faire de ces condoms, moi, pauvre maître d’école décharné ? Mais silence ! Je veux en faire cadeau à Madame la Juge en remerciement du pot de petits pois qu’elle me fit tenir. Elle se connaît en toutes