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DE SABLE MÉMORIAL


Le Géant a planté son doigt
Dans un grand navire qui doit
Passer le lac de son empire.
Son doigt est le mât du navire.
Et des ours bruns courbent leurs dos
Sous leurs fourrures pour fardeaux,
Courbent leur échine de flamme.
La tempête en fait une lame
De scie ou des murs à créneaux
Ou des follets sur des fourneaux.
Ils rament sur l’eau bouillonnante,
Rythmant la danse frissonnante
Des bruns frisons de leurs toisons
Aux coups de fouet des horizons.

La Princesse pâle à la proue,
Les yeux aux dos de ses rameurs,
Voit tournoyer comme une roue
Un grand oiseau dans les rumeurs
Et tes tonnerres du repaire.
Le grand oiseau vert au long cou
Tord ses ailes fortes, espère
Voler contre l’ouragan fou.