— Toi aussi, dit-il, ils te connaissent au collège Ils trouvent que tu as l’air fine.
Je ne savais quelle contenance prendre.
— Il y en a un, continua Jean, qui te trouve la plus belle du couvent et il t’aime.
Alors, c’était un sot : les petites filles ne se gênent pas pour se faire connaître leurs vérités et je savais depuis longtemps que je n’étais qu’un « gros pâté », que j’avais une « face de lune » et les yeux petits. On n’est pas belle dans ces conditions. Jean acheva :
— Il le dit à tout le monde et il voulait que Gonzague te demande de lui écrire.
Jusque-là, j’avais balancé entre l’incrédulité et le plaisir étonné, mais à ce dernier mot, le sang me monta au visage.
— Je veux pas qu’il parle de moi !
— Pourquoi ? dit Jean. Ça te choque ?
— Je veux pas ! répétai-je.
— Dans ce cas-là, sois tranquille, je vais le faire taire, moi, affirma mon cousin. C’est un grand, mais ça ne fait rien.
Et après un moment :
— Vas-tu lui écrire ? demanda-t-il encore.
Je secouai la tête en rougissant.
— Tu feras bien, approuva-t-il. Parce que, vois-tu, si les maîtres le découvraient, ils le diraient aux sœurs et tu te ferais punir en grand.
Cette menace me froissa : certes, l’avertissement avait son prix, mais Jean me croyait-il donc capable d’écrire aux écoliers ? Depuis lors, cependant, par pure curiosité et dans des rôles dédaignés ou