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MOISSON DE SOUVENIRS

Mon travail achève. Une autre période va commencer pour moi : la période déchirante des séparations savourées une à une. Je crois que je m’imagine assez bien ce que cela doit être. L’autre jour, j’ai jeté au feu mes cartes postales représentant deux enfants au pied d’une croix. Ma chambre est remplie de choses que j’aime. Les miens vont s’étonner, s’affliger. Oh ! j’ai peur !… Mais il ne faut pas penser à ces choses.

Je devrai aussi me transformer, dépouiller ces petits défauts innocents auxquels je tenais, subir bien des contradictions, bien des ennuis. Qui donc me pousse dans ce chemin difficile que je n’ai pas choisi ni désiré et dont je tremble déjà d’être détournée ? Je ne connais même pas le bon Dieu : l’ayant cherché, plus jeune, j’ai cru l’entrevoir et il m’a terrifiée. Mais Jean me dit, qu’incommensurablement bon, il voilera sa splendeur devant mes faibles yeux et me portera dans ses bras, si je ne puis marcher. Jean a raison, et je veux mettre mes pas dans les siens. Ô mon Dieu, ayez pitié de nous qui allons à Vous.


FIN