Page:Jarret - Contes d’hier, 1918.djvu/151

Cette page a été validée par deux contributeurs.
143
L’INFÂME

de fumée bleue, légère comme un rêve… Tiens ! Bleu, blanc, rouge… Alors, vive la France !

— Maman, quand j’étais un petit bébé ?

— Quoi, mon mignon ?

— J’ai pas déboulé quand j’étais un petit bébé ?

— Mais non. Quand tu étais petit, maman te portait dans ses bras, et elle veillait sans cesse sur toi, comme maintenant, elle veille sur petite sœur.

Je regarde Juliette, ma petite femme de vingt-et-un ans : sérieuse et douce comme toujours, elle n’a qu’un grand rire amusé, très fin, au fond de ses yeux noisette. Gilberte rit franchement. Créature insouciante s’il en fut jamais. Elle a deux ans de plus que ma femme, on lui en donnerait trois de moins. Je l’ai toujours connue aussi gaie, aussi prime-sautière. Quelle merveilleuse compagne de jeux elle a été ! Il n’y avait pas d’escapades, de folles équipées qu’elle ne fût prête à entreprendre, au grand tourment de cette pauvre Alice, notre seconde mère, car c’est pour ainsi dire elle qui nous a élevés Gilberte et moi.

La tempête ne ralentit pas : les bancs de neige fument comme des volcans, les toits sont