Page:Jarret - Contes d’hier, 1918.djvu/144

Cette page a été validée par deux contributeurs.
136
CONTES D’HIER

fut long, mais enfin la jeune fille sentit que le sommeil tant désiré approchait. Elle devenait toute passive. Des images précipitées, saugrenues, mirages de l’imagination, passaient devant ses yeux ; puis tout s’apaisa. C’est fait, elle dort.

Lorsqu’elle reprit conscience d’elle-même, il faisait gris partout et elle sentit renaître sa rancune. Sa tante ne l’aimait pas. Car alors, pourquoi la contrarier ainsi ? Évidemment, elle ne désirait pas la voir se marier ; cette grande fille active aux doigts de fée, c’était d’une commodité dans la maison ! « — Je regrette beaucoup, mais Berthe n’est pas bien, aujourd’hui. — Permettez donc que je ferme la porte… »

Ah ! on voulait se moquer d’elle, eh bien ! les choses ne languiraient pas. Comme on a raison de plaindre les orphelines ! La vie est à jamais empoisonnée pour eux. Un père, une mère, cela ne se remplace pas. Résolument, sous le coup d’une fatale décision, la jeune fille gravit l’escalier et se rendit à sa chambre. Elle ne resterait pas une heure de plus dans cette maison inhospitalière. Juste le temps de se couvrir d’un manteau et d’apporter quelques vêtements…