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LE VOYAGE BLANC

Tout à coup, il recommença à neiger, et comme si c’eût été un signal, M. Clément s’écria :

— Annette, penses-tu encore à ce que je te disais tantôt ? La petite ne sut que répondre…

— Il n’y faut pas songer, tu es trop jeune, ton père est un vieux fou… Si ces choses te viennent à l’esprit, chasse-les comme des péchés, Annette ! Trouvez un homme plus bête que moi ! Une enfant de douze ans. Elle va se mettre à jongler, et c’est tout ce que j’en aurai.

À la gare, ils rencontrèrent le paysan qui avait loué la traîne. M. Clément l’aborda, paya sans une plaisanterie, et à grandes enjambées, gagna l’extrémité de la plate-forme, pour y attendre le train allant à Montréal. Annette trottinait à ses côtés et avait envie de pleurer en le voyant si triste. Que pourrait-elle dire qui le déridât ?… Elle cherchait et ne trouvait rien, rien. Qu’est-ce donc qu’elle pourrait dire ? Subitement l’inspiration lui vint, elle approcha davantage de son père, s’empara de son bras, et levant sa tête câline, en battant très vite des paupières pour chasser les flocons aveuglants, elle murmura :