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CONTES D’HIER

Il ne neigeait plus, mais le ciel demeurait gris. La terre, enflée, était blanche à perte de vue. La neige s’était posée partout : elle avait coiffé comme des vieilles, les maisons aux toits pointus : les pieux des clôtures s’en étaient fait un bérêt ; elle avait l’air d’un peu d’ouate le long des branches maigres des arbres ; sur les haies de broussailles, elle s’étalait, éblouissante, comme les draps que les ménagères y étendent, l’été. Annette voyait tout cela, elle entendait les grelots clairs qui sonnaient gaiement, mais ses pensées restaient tristes. Elle songeait au bon petit Armand qu’elle n’avait pu voir au départ, à son père, à sa grand’mère, à sa tante qui avait dit « non ». Et sans le vouloir :

— Je n’aime pas ma tante Annie, fit-elle tout haut. Son père se retourna vivement.

— Tu nous as entendus, demanda-t-il ?

— Non, papa, je pensais à autre chose, mais j’ai compris qu’elle avait refusé.

— Il vaut mieux que tu n’aies pas entendu.

Mais dès cette parole, M. Clément parut tourmenté : maintes fois, il se retourna, et toujours il