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Sud, leur situation resterait ce qu’elle est aujourd’hui, ou en serait plutôt améliorée.

L’énorme stock d’argent que détient la Banque de France et qui se renouvelle constamment, malgré les efforts qu’elle fait pour le rejeter dans le public, ne s’accroîtrait plus au moins.

Toute perte sérieuse pour la Banque serait évitée, puisque ses billets de 50, de 100 et de 500 francs seraient toujours remboursables en argent si elle le voulait. Elle ne serait obligée de rembourser en or que ses billets de 1.000 francs, qui, grâce à cela, circuleraient dans le monde entier comme les banknotes anglaises, tandis qu’aujourd’hui la possibilité d’un remboursement en écus limite leur circulation au territoire national. Elle pourrait donc maintenir habituellement son taux d’escompte à 3 p. 100, sans être d’ailleurs gênée pour l’augmenter par la loi, et elle continuerait ainsi une politique financière qui l’a rendue justement populaire dans le pays. Un expédient, qui ne serait pas à dédaigner, serait l’augmentation jusqu’à 8 francs ou 10 fr. par tête d’habitant, au lieu de 6, de la monnaie divisionnaire d’argent au titre de 0,835. Le bénéfice que les gouvernements de l’Union monétaire latine retireraient en convertissant en cette monnaie une certaine quantité de leurs écus diminuerait la perte éprouvée du chef de la dépréciation de leur stock d’argent. L’Italie, au commencement de mars 1892, a fait des ouvertures en ce sens que l’on a peut-être eu tort de repousser.

XIV. — La dépréciation de l’argent a rendu la concurrence des exportations indiennes d’autant plus active que, contrairement aux prévisions théoriques, l’augmentation du stock monétaire n’a pas encore élevé les salaires et les prix dans l’intérieur du pays. La coutume, toute-puissante sur les masses, y maintient jusqu’à présent les anciens prix, si ce n’est sur certains points plus en contact avec les grands courants commerciaux. C’est là un fait transitoire et la hausse finira par se produire. Au Tonkin et en Cochinchine, l’établissement français a déjà eu ce résultat. Cependant, le plan proposé par certains hommes d’affaires anglais d’établir leur système monétaire à base d’or dans l’Inde est absolument chimérique. Le niveau des prix et des salaires est encore trop bas dans l’intérieur du pays. Ce serait créer des difficultés de vie inextricables aux populations pour débarrasser les exportateurs de Manchester de la question du change indien. Tout naturellement, l’Inde absorbera peu à peu une plus grande quantité d’argent au fur et à mesure que les prix s’élèveront et que le réseau des chemins de fer en devenant plus serré multipliera les échanges intérieurs.

Le Japon, en adoptant la civilisation européenne, a frappé des monnaies sur notre modèle. Comme il gravite dans l’orbite des États-