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Elle serait beaucoup moins périlleuse, si la République américaine parvenait à persuader à l’Angleterre, à l’Allemagne, à l’Union Scandinave et à l’Union monétaire latine de reprendre d’un commun accord le monnayage illimité de l’or et de l’argent sur la base du rapport de 1 à 15 1/2 ou de tout autre rapport à déterminer. La constitution d’un accord universel résulterait en fait de l’entente de ces cinq puissances ; car les autres pays en sont à une circulation d’argent ou au papier-monnaie.

X. — C’est surtout auprès de l’Union monétaire latine que les États-Unis et les marchands de métaux précieux établis en Europe (chap. ix, § i, et chap. xii, § 9) font leurs plus grands efforts ; car dans cette union il y a deux membres besogneux : l’Italie et la Grèce. La Belgique est dans une position fâcheuse pour avoir jusqu’en 1876 imprudemment laissé les grands marchands d’argent frapper à sa monnaie des écus qu’elle a dû s’engager à racheter en or par une clause introduite dans la convention monétaire de 1885.

Mais l’Union monétaire latine et surtout la France ne pourraient reprendre le monnayage de l’argent qu’à la condition que l’Allemagne et l’Angleterre fissent de même. Or, il n’en sera rien.

L’Allemagne a fait en 1873 des sacrifices considérables pour s’assurer une circulation d’or, et elle a lieu d’être satisfaite de sa situation monétaire. Elle est si peu disposée à s’en départir qu’en 1886 elle a vendu au gouvernement Égyptien pour plus de 800 millions de francs d’argent en barres et en vieux thalers, en profitant d’un moment où le cours avait un peu remonté et en stipulant que l’Égypte ferait fabriquer à Berlin sa nouvelle monnaie. L’Autriche, qui évolue dans l’orbite financière de l’Allemagne, en faisant ses préparatifs pour abolir, en 1892, le cours forcé du papier-monnaie, a déclaré qu’elle prendrait l’étalon d’or.

Quant à l’Angleterre, elle pousse l’Union monétaire latine a adopter le double étalon, parce que le cours de la roupie se relèverait immédiatement ; mais la fraction de la Commission monétaire de 1888, qui a proposé de revenir au bimétallisme, au bénéfice d’un accord international, a formellement réservé la question du rapport à établir entre les deux métaux.

Les bimétallistes de Manchester ne veulent plus en effet du rapport de 15 1/2 à 1, qui les empêcherait d’avoir de l’argent à bon marché pour faire leurs remises dans l’Inde, et ils entendent continuer à profiter du bas prix du métal blanc. En décembre 1891, le Chancelier de l’Échiquier, M. Goschen, revenant sur la question, a déclaré, pour engager l’Union monétaire latine a reprendre le monnayage de l’argent, que dans ce cas la Banque d’Angleterre pourrait admettre l’argent pour un cinquième dans la composition de sa réserve, quelque