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latine qui est de 1 à 15 1/2. Ces conclusions sont une satisfaction platonique donnée à l’opinion selon laquelle la baisse actuelle des prix provient de ce que l’argent ne sert plus aux transactions du marché international depuis que l’Allemagne l’a démonétisé en 1873 et que l’Union monétaire latine a suspendu sa frappe. L’or, qui reste seul à faire fonction de monnaie, est produit, ajoute-t-on, en quantité insuffisante, ce qui amène fatalement la baisse des prix. « Les transactions du monde, dit M. de Laveleye, le plus illustre et surtout le plus désintéressé défenseur de cette idée, se faisaient par le moyen de chars portés sur deux roues, l’une de métal blanc, l’autre de métal jaune. On a partout brisé l’une de ces roues, et l’on s’étonne qu’il y ait un désarroi dans le commerce général du monde[1] ! » Un mot nouveau a été créé pour désigner ce phénomène, c’est l'appréciation de l’or par opposition à la dépréciation de l’argent. Qu’y a-t-il de fondé dans cette thèse que soutiennent aussi MM. Goschen, Cernuschi et les Agrariens prussiens, mais qui est vivement combattue par des économistes non moins autorisés, par MM. Mulhall, Juglar, Leroy-Beaulieu, Neumann-Spallart, Sœtbeer, Broch, Pirmez, Raffalowich, Ad. Coste, Dalla Volta ?C’est ce que nous allons examiner.

III. — Il faut d’abord éliminer l’action des alternatives de hausse et de baisse des prix, qui se déroulent avec une certaine régularité par période de sept à onze ans, sauf des circonstances perturbatrices, comme une grande guerre. Elles proviennent de la confiance, de l’entraînement, puis de la panique et de la réserve par lesquelles passent successivement les hommes d’affaires. L’ensemble des marchandises en est affecté, encore que les prix de quelques-unes puissent être influencés par un mouvement contraire dû aux conditions de leur production. L’on peut assez bien figurer graphiquement par des courbes ondulées ces cycles du crédit ou ces marées économiques. Plusieurs indices, les mercuriales des matières premières, l’augmentation et la diminution en sens inverse de l’encaisse des banques et de leur portefeuille, le chiffre des sommes compensées dans les clearing-houses, permettent d’en suivre les différentes phases. Mais ces alternances de l’activité économique ne sont qu’une des causes des oscillations des prix. Leur influence est bornée au monde des affaires, et elles ne durent pas assez longtemps pour modifier les rapports sociaux.

Il en est autrement des changements dans les prix qui proviennent, soit d’une modification dans les conditions générales des industries,

  1. V. son ouvrage : la Monnaie et le bimétallisme international, in-12. Paris, Alcan, 1891.