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apporté un remède efficace aux maux de l’usure dans leur patrie. Un tel bienfait doit mettre les esprits sincères en garde contre les exagérations de l’antisémitisme. Si les casse rurali dei prestiti sont encore à leurs débuts, les 604 banche popolari, qui existaient au 1er janvier 1888, constituent la force financière la plus solide de l’Italie. Elles n’ont pas créé un système hiérarchique de banques, comme les Vorschussvereine allemands, parce que les plus solides d’entre elles sont à même de faire réescompter directement leur papier par quelqu’un des cinq grands Instituts d’émission ; mais elles se soutiennent les unes les autres et elles ont remplacé en grande partie les maisons de banque privées. L’Italie, grâce à ses banques populaires, ne verra jamais se constituer chez elle la Haute Banque. Plût à Dieu qu’une politique plus sage ne l’eût pas mise à la merci des grands banquiers de Francfort et de Hambourg et des établissements de crédit de Paris, réduisant ainsi ce beau pays, le premier foyer de la civilisation, à la condition de ces peuples de l’Orient et de l’Amérique du Sud qu’exploite la Finance cosmopolite !

Par suite d’une loi économique déjà indiquée (§ 3), l’élévation du taux de l’intérêt y a rendu très prompte la multiplication des capitaux engagés dans les banques populaires. Par leur moyen une multitude de petits commerçants, d’artisans, de bourgeois, d’employés, de propriétaires ruraux sont devenus des capitalistes. L’ouvrier proprement dit n’a pas pu en profiter d’abord ; mais le maintien des classes moyennes et leur développement sont aussi importants que l’amélioration du sort des classes inférieures. Puis les hommes éminents, qui dirigent ces institutions, entendent les maintenir dans leur cadre primitif, en limitant à 5 ou à 6 p. 100 l’intérêt alloué au capital[1] et employer une part de plus en

  1. Cette pratique est courante dans les sociétés anonymes qui se forment en France pour promouvoir certaines œuvres d’intérêt public, comme la fondation d’écoles, la construction d’habitations populaires (chap. v, § 5). La Caisse générale d’épargne de Belgique fait des prêts à 2 1/2 p. 100, au lieu de 3 p. 100, aux sociétés pour la construction d’habitations ouvrières, qui, renonçant à posséder elles-mêmes des immeubles, ont pour objet exclusif de faire des avances aux ouvriers et limitent à 3 p. 100 les dividendes du capital versé.