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plier à ces conditions nouvelles des affaires, et, en France notamment, les lois de 1863 et de 1867 rendirent pleinement libre l’adoption par les entreprises industrielles de la forme anonyme.

VIII. — Pendant longtemps, en raison de la nature des opérations de banque, du secret qu’elles exigent notamment, il semblait qu’une maison de banque ne pouvait fonctionner que sous la direction d’un ou de plusieurs associés, recrutant tout au plus des commanditaires dans le cercle de leur famille ou de leur clientèle. Mais le désir de réagir contre la prépondérance acquise par la Haute Banque et en même temps la masse des capitaux cherchant des emplois nouveaux, ont provoqué, depuis une trentaine d’années, dans tous les pays, la formation de puissants établissements de crédit, organisés en sociétés par actions. Les États-Unis et le Canada depuis longtemps montraient par leur pratique que l’escompte et les autres opérations d’une banque de commerce n’étaient pas incompatibles avec la forme de société par actions[1]. Mais aucune de ces banques ne pouvait donner une idée de l’importance qu’allaient prendre en Europe les grandes sociétés de crédit[2].

L’idée première en remonte aux saints-simoniens ; ils rêvaient une organisation des diverses formes du crédit en monopoles concédés par l’État. La République de 1848 et le second Empire firent des applications partielles de ces théories, qui eurent au moins le mérite de frayer la voie à de nouvelles institutions.

Au lendemain des journées de Février, le crédit s’était

  1. Sur le développement graduel des banques par actions en Amérique, V. le curieux ouvrage de J.-S. Gibbons, the Banks of New-York, their dealers, the Clearing-House and the panic of 1857, with a financial chart (New-York, 1859).
  2. Aux Etats-Unis, les banques d’escompte et d’émission sont des entreprises moyennes comme importance de capital. Leur nombre même l’indique. En 1890, on comptait 3.567 banques nationales et un nombre presque égal de banques d’Etat et de banques privées. La Haute Banque existe aussi à New-York. Elle est représentée par des maisons de premier ordre qui peuvent marcher de pair avec la Haute Banque européenne, sauf les Rothschild. Tels sont les Drexel and Morgan, que commanditent les Vanderbilt, Bliss and Morton, Lazard frères, Seligman, Corbin. Plusieurs sont Israélites. Ces grands banquiers font surtout le commerce du papier de change et des métaux précieux, ainsi que les arbitrages de bourse.