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que du travail manuel. La concentration de toute leur activité depuis vingt siècles sur les affaires d’argent a, par un effet d’hérédité, développé chez eux les capacités financières à un degré supérieur encore à celui que possèdent les Génois, les Écossais, les Genevois, les Arméniens, les Parsis.

Encore qu’ils aient leur bonne part des vices humains, les Juifs ont au moins conservé celles des qualités morales qui empêchent la désorganisation sociale ; ils observent à leur foyer la loi de la fécondité et attachent un grand intérêt à avoir une nombreuse postérité. Le nombre des enfants qu’a comptés chaque génération des Rothschild leur a toujours fait trouver parmi eux l’homme capable de diriger de si grandes affaires. Le respect des parents est profond et les familles juives puisent dans ce sentiment une force qui les préserve de la dissolution causée par les codes et surtout par l’esprit moderne.

Le vieil Mayer-Amschel Rothschild avait recommandé en mourant à ses cinq fils, réunis à son chevet, de demeurer fidèles à la loi de Moïse, de rester étroitement unis et de ne rien entreprendre sans consulter leur mère. « Observez ces trois préceptes, leur dit-il, et vous deviendrez riches parmi les plus riches et le monde vous appartiendra. » A son tour, Nathan Mayer, celui qui s’établit à Londres, et y créa la grande puissance de la maison, fit un testament par lequel il laissait de larges dots à ses filles, mais leur défendait de prendre aucune connaissance de l’état de sa fortune et leur enjoignait de ne se marier qu’avec le consentement de leur mère et de leurs frères. Même en France, le Code civil n’intervient guère dans les grandes familles juives. Elles se font leur loi de succession à elles-mêmes, comme les familles souveraines, et des mariages, conclus presque toujours dans le cercle de la descendance des cinq frères, ajoutent à la concentration des fortunes et à la solidarité des diverses branches des Rothschild.

Les israélites contemporains ne méprisent pas le travail.