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avaient été en partie absorbés par la société dans laquelle ils s’étaient introduits. Les fils des financiers que nous avons cités au chapitre précédent s’étaient pour la plupart convertis au Christianisme[1].

Chassés à plusieurs reprises de l’Allemagne, les Juifs avaient pu cependant se maintenir dans un certain nombre de villes impériales, grâce à la protection de l’Empereur et à la sympathie qu’éprouvaient généralement pour eux les sénats aristocratiques de ces villes. Plusieurs étaient parvenus à une grande richesse dans le cours du xviiie siècle. On a conservé le souvenir du riche négociant de Hambourg, Gugenheim, le beau-père de Mendelsohn. A Vienne, sous le nom de Hof Juden, ils obtenaient des privilèges personnels proportionnés à leur richesse :en 1785, ils avaient à leur tête Samuel Oppenheim, la tige des banquiers de ce nom, et Joseph II donnait le titre de baron au banquier Joseph Michael Arnstein. A Berlin, sous Frédéric II, le banquier Itzig avait une position importante ; en Alsace, Cerfbeer avait fait une grande fortune, fort honorablement d’ailleurs, comme fournisseur des armées royales, et il avait obtenu des lettres de noblesse avec la permission de posséder des biens fonds. Il était en même temps conseiller de commerce du landgrave de Hesse-Darmstadt, de la maison palatine des Deux-Ponts et des princes de Nassau[2]. C’était un titre pareil que possédait à cette époque un Juif de Francfort, fils d’un pauvre brocanteur, Mayer-Amschel Rothschild. Il sauva pendant l’invasion française la fortune de l’électeur de Hesse[3] en la faisant passer à un de ses fils, Nathan-Mayer, qui s’était établi à Londres en 1798. Il y avait fondé une maison de banque et y avait épousé en 1806 la fille d’un riche banquier juif Levi

  1. Une des conversions les plus honorables de cette époque est celle de l’économiste David Ricardo. Il fut exhérédé par son père ; mais il devint plus tard un des membres les plus considérés de la Chambre des communes.
  2. V. Lehmann, l’Entrée des Israélites dans la société française (6e édit. 1886, Lecoffre), pp. 99.100. Sur la condition des Juifs en Allemagne à cette époque, V. Graetz, Geschichte der Juden (Leipzig, 1868), t. X pp. 29 à 51 et t. XI.
  3. Le général Marbot (Mémoires, Plon, 1891, t. I, pp. 310-311), qui parait