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à des compagnies qui avaient obtenu le droit de toucher directement dans les caisses des receveurs les deniers qui y rentraient, sans que leur situation fût connue quant aux fournitures qu’ils avaient promis de faire. Un simple marché passé avec un ministère pour une fourniture était alors un moyen de faire fortune. Sur la représentation de ce marché, le ministre des finances donnait sur une partie du revenu une délégation proportionnée à la valeur estimative des fournitures à faire.

II. — Il est utile de rappeler ces souvenirs : une poussée socialiste internationale pourra bien, quelque jour, flamber les bourses, brûler les grands livres des dettes publiques et les titres des sociétés par actions, comme il y a un siècle les Jacobins brûlèrent les chartriers des châteaux. Des parlements collectivistes interdiront toutes les spéculations et proscriront l’intérêt ; mais sur ces ruines une nouvelle société naîtra avec des honnêtes gens appauvris et des malfaiteurs enrichis. Les bourses se relèveront et de nouveaux emprunts d’État, de nouvelles actions s’y négocieront au profit des descendants de ceux qui auront fait ce vaste auto da fe révolutionnaire. Ainsi se passèrent les choses après la Terreur.

La Convention avait entrepris de régler la Bourse et les marchés. Une loi du 13 fructidor an III, considérant que « les négociations de la Bourse n’étaient plus qu’un jeu de primes où chacun vendait ce qu’il n’avait pas, achetait ce qu’il ne voulait pas prendre et où l’on trouvait partout des commerçants et nulle part du commerce », défendit sous des peines sévères de vendre des marchandises ou effets dont on ne serait pas propriétaire au moment de la transaction. Malgré cela l’agiotage se donna carrière plus que jamais, nous venons de le voir. On avait gêné seulement les affaires honnêtes. Une loi du 28 vendémiaire an IV renouvela ces prescriptions, et pour les faire exécuter chargea les comités de Salut public de nommer les agents de change ! Un arrêté du Directoire du 2 ventôse an IV, allant droit à l’encontre du principe fondamental de la Bourse, ordonnait que « tout marché conclu par