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l’on appelait dans le langage du temps des proxénètes et dont aucune mesure n’a jamais pu arrêter l’industrie. L’édit de 1785, qui défendait les opérations à terme, d’après l’auteur des Étrennes financières, n’aurait eu pour effet que de pousser à l’agiotage. Les agents de change ne pouvaient, selon lui, trouver la rémunération du prix élevé de leur charge qu’en jouant pour leur propre compte[1].

M. A. Neymarck estime de 200 à 300 millions le montant des valeurs mobilières alors en circulation en France. Des valeurs étrangères, notamment les actions de la Banque Saint-Charles et de la Compagnie des Philippines, y étaient l’objet de spéculations actives. Le gouvernement en prit ombrage et l’arrêt du 7 août 1785 interdit de les coter à la Bourse. En même temps, Calonne commandait à Mirabeau un pamphlet pour les discréditer et provoquer des arbitrages entre ces actions et l’emprunt qu’il venait d’émettre, mais qui n’était pas classé après plusieurs mois.

Les dernières années de l’ancien régime furent marquées par un vif essor de la spéculation et de l’agiotage. On peut en voir un tableau tracé avec passion par Mirabeau dans un pamphlet intitulé : Dénonciation de l’agiotage au Roi et à l’Assemblée des notables, en 1787[2]. Quelques gros spéculateurs jouaient tantôt à la hausse tantôt à la baisse sur les actions de la Compagnie des Indes, de la Société des eaux de Paris, de la Compagnie des assurances générales contre l’incendie, de la Caisse d’escompte et sur les valeurs espagnoles.

  1. Les Etrennes financières ou recueil des matières les plus importantes en finances, banque, commerce, etc., lre année, 1789, 2e année, 1790, 2 vol. in-8, Paris.
  2. Dans ce pamphlet, Mirabeau déclame contre l’agiotage et prétend que les seuls moyens de l’arrêter sont la liberté de la presse et une constitution !Cela indique l’absence de toute valeur scientifique de cet opuscule passionné et déclamatoire. Deux autres pamphlets que Mirabeau avait fait paraître en 1785, l’un sur la Compagnie des eaux, l’autre sur la Caisse d’escompte, paraissent avoir été écrits uniquement pour favoriser des spéculations à la baisse sur ces valeurs. M. de Loménie, dans l’étude que nous avons citée, a remarquablement reconstitué l’ensemble des campagnes de Bourse au milieu desquelles Mirabeau se jeta. Beaumarchais était à la solde d’un autre groupe de financiers.