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institutions de crédit foncier[1]. En France, d’après Forbonnais, au milieu du siècle, les capitaux employés en immeubles rapportaient de 3 à 4 p. 100[2] ; l’escompte ne dépassait pas 6 p. 100 et en 1776 la Caisse d’escompte escompta régulièrement à 4 p. 100. Le même taux fut adopté parla Banque Saint-Charles en Espagne en 1782[3]. Le Clergé de France empruntait à 4 p. 100. Mais le crédit de l’État était bien inférieur et les emprunts royaux ne s’émettaient guère qu’au 5 et au 6 p. 100. C’est ce qui fit que lorsqu’un édit de 1766 prétendit abaisser le taux légal de 8 à 4 pour 100, il ne fut pas observé.

Ces taux, très bas comparativement à ceux du siècle précédent, et que les destructions de capitaux par la Révolution devaient faire remonter, contribuèrent beaucoup à la fondation des sociétés par actions, au développement des emprunts d’État et aussi à la reprise des spéculations de Bourse. On ne saurait toutefois trop remarquer qu’il s’agit là des placements de toute sûreté et des cours pratiqués dans les grandes places commerciales. Si le taux de l’intérêt perçu dans ces conditions était plus bas au xviiie siècle qu’il ne l’a été au xixe, l’usure avait bien plus d’extension dans les campagnes et les couches inférieures de la population qu’elle n’en a actuellement dans tous les pays de l’Europe occidentale où l’état économique est normal (chap. xiii, § 4).

IX. — Sous l’influence de ces deux causes, la Bourse prit à Londres un essor considérable et tint dans la vie économique du pays une place qu’elle devait à peine prendre en France

  1. Staatslexikon de la Gœrresgesellschaft, v° Banken. En Angleterre, un projet de banque foncière avait été mis en avant peu après la révolution de 1688 par un nommé Chamberlain. La Land bank avait été incorporée ; mais la souscription aux actions échoua devant le bon sens des capitalistes. La combinaison reposait sur le prêt à l’État du montant des espèces métalliques versées par les actionnaires et sur l’émission, par le Trésor, d’un papier-monnaie avec lequel il aurait fait des prêts à bon marché aux propriétaires obérés !V. Thorold Rogers, the first nine years of the bank of England (London, 1887).
  2. Recherches et Considérations sur les finances, t. I, p. 372.
  3. En Espagne, au milieu du xviiie siècle, les capitalistes prêtaient volontiers à 2 et 3 p. 100 aux sociétés commerciales qui offraient des garanties solides, dit Bourgoing, Tableau de l’Espagne moderne (1789), tome I, p. 248. Il en était de même à Gênes. V. Roscher, Principes d’économie politique, §§ 185-186.