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généralement mangeaient rapidement la fortune paternelle. Grâce à leur prompte résorption dans le corps social, ces premières fortunes financières étaient loin d’avoir les conséquences économiques des accumulations de capitaux des banquiers israélites contemporains, qui font la boule de neige à chaque génération.

V. — Ces grands Traitants, qui paraissent sur la scène des affaires publiques, ne pouvaient faire des opérations si importantes que parce qu’ils avaient derrière eux de nombreux bailleurs de fonds intéressés au profit et à la perte, qu’ils recevaient des dépôts comme des banquiers et enfin qu’ils trouvaient à négocier les effets royaux que le Trésor leur remettait pour leurs avances.

Dans le cours du siècle, des capitaux s’étaient constitués dans le pays, et un certain nombre de riches banquiers étrangers étaient venus s’y établir. Tel avait été ce Jean Houft, originaire de Liège et mort à Paris en 1651, qui sous Richelieu avait fourni des subsides au duc de Saxe-Weimar et acheté pour le compte du roi des munitions d’artillerie. D’après Grotius, il faisait le commerce du change, non seulement avec la Hollande, mais encore avec la Suède et Francfort. Les frères Herwarth, nés à Lyon d’une famille de banquiers d’Augsbourg, avaient été aussi employés par Richelieu et par Mazarin comme munitionnaires. L’un d’eux, Barthélémy, eut un rôle politique et pendant la Fronde ramena l’armée de Turenne au devoir en lui payant l’arriéré de sa solde. Il fit, de 1649 à 1657, des avances très considérables au roi et fut nommé contrôleur général des finances. Le 5 septembre 1661, après l’arrestation de Fouquet, Louis XIV lui écrivait pour lui demander de nouvelles avances jusqu’à concurrence de deux à trois millions de livres, comme il avait fait précédemment[1].

Une véritable bourse s’était constituée à Paris pour la négociation des effets publics et des effets des Traitants. Les

  1. V., dans la Revue historique de 1879 : un Banquier protestant en France au xviiie siècle, par M. Depping.