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taux de l’intérêt alla toujours en baissant. La Banque était devenue une institution solide. Elle provoqua la refonte générale de la monnaie en 1710, opération qui ne coûta pas moins de 2.700.000 liv., mais qui rendit à la monnaie nationale sa véritable valeur et mit fin à des pertes sur le change désastreuses jusque-là. Quelques années après, en 1717, elle fut chargée du service de la Trésorerie. Elle prêta son appui aux premières opérations de conversion de la dette publique qui eurent lieu dans le cours du xviiie siècle (§ 8), et c’est à elle qu’on dut leur succès[1].

La création du National debt office et de la Banque d’Angleterre marque une date dans l’histoire économique. Les emprunts publics en rentes perpétuelles avaient été pratiqués bien avant Guillaume III par la seigneurie de Florence et par les rois de France. Mais tandis que tous les autres gouvernements payaient très irrégulièrement leurs dettes ou faisaient banqueroute de temps à autre, ce prince fonda, peut-on dire, son système de gouvernement à la fois sur la fidélité à payer les intérêts de la dette et sur l’emprunt à jet continu au fur à mesure de ses besoins. Pendant un siècle et demi, c’est-à-dire jusqu’en 1815, l’Angleterre a emprunté à outrance et elle a pu le faire précisément parce qu’elle inspirait confiance aux capitaux du monde entier, alors que, sauf la Hollande, aucun autre gouvernement ne leur offrait de sécurité[2]. Le résultat fut que pendant tout ce temps le peuple fut extraordinairement chargé. D’autre part le régime protecteur et les lois sur les céréales favorisaient abusivement les capitalistes et les propriétaires. C’est seulement depuis cinquante ans que ces abus ont disparu et qu’en même temps l’Angleterre, ayant à peu près cessé d’emprunter, le poids de sa dette est devenu bien plus léger comparativement à la richesse

  1. V. Octave Noël, les Banques d’émission en Europe (Berger-Levrault, 1888), t. I, pp. 1 à 9, et Thorold Rogers, the First nine years of the Bank of England (London, Mac-Millan, 1887).
  2. V. Montesquieu, Esprit des lois, livre XXII, chapitres xvii et xviii : Des dettes publiques, du paiement des dettes publiques. Il y est question uniquement du système financier de l’Angleterre, qui est proposé pour modèle à tous les autres pays.