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partir du règne d’Élisabeth le commerce maritime de l’Angleterre avait pris un grand essor. Cependant le crédit public n’était pas né, et, quand Charles II eut besoin d’argent, en 1672, il ne trouva rien de mieux que de s’emparer des dépôts de monnaie faits par les bourgeois et les orfèvres de Londres à la Tour. Le mécontentement causé par ce procédé ne fut pas pour peu dans le succès de la Révolution de 1688.

Déjà pendant la Restauration, des plans plus ou moins chimériques de banques d’émission, voire de monétisation de la propriété foncière[1], avaient été mis en avant. Lord Montague, le ministre de Guillaume III, eut le mérite de distinguer entre tous ces plans et de se fixer en faveur d’un projet présenté par un financier écossais, William Patterson, et qui allait lier les emprunts nécessités par la guerre avec la France à la fondation d’un puissant établissement de crédit.

En juillet 1694, le Roi empruntait 1.200.000 liv. st. en rente perpétuelle au taux de 8 p. 100 à un groupe de bourgeois de Londres, auxquels, entre autres avantages, il accordait le privilège de former une corporation sous le titre le Gouverneur et la Compagnie de la Banque d’Angleterre, avec le droit d’émettre des billets au porteur. Ce privilège n’était concédé d’abord que pour neuf ans ; mais il fut continué indéfiniment par des prorogations à l’occasion desquelles la Banque fit de nouvelles avances au Trésor. La plupart furent gratuites, en sorte qu’au milieu du xviiie siècle le taux d’intérêt sur l’ensemble de ses avances était réduit à 4 p. 100. Son privilège, quant à l’émission des billets, fut mieux défini ; aucune autre compagnie composée de plus de sept personnes ne put en émettre dans Londres et un rayon de 60 milles autour.

Des emprunts successifs en rente perpétuelle portèrent à un chiffre fort élevé la dette publique sous Guillaume III et ses successeurs. Mais, grâce à la fidélité avec laquelle les intérêts en furent payés, le crédit de l’État se raffermit et le

  1. V. Macaulay, Histoire du règne de Guillaume III.