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retour prochain à la circulation métallique. Du même coup, les conditions économiques générales de cette partie de l’Empire se sont sensiblement améliorées (chap. xii § 10). Mais dans le royaume de Hongrie, une politique de casse-cou, secrètement encouragée par l’Allemagne, a amené une situation qu’un seul trait caractérisera. On lisait dans Pesther Lloyd, organe officieux du ministère Tisza, en date du 24 décembre 1888 :

Le grand chambellan de S. M. le roi a remis, aujourd’hui, à M. le baron Albert de Rothschild le brevet qui donne rang à la cour à lui et à sa femme, la baronne Bettina de Rothschild. Ce brevet a été délivré sur la proposition de M. Tisza, président du ministère, « en reconnaissance des mérites de M. de Rothschild pour le développement du crédit national de la Hongrie ».

Un écrivain judicieux, M. G. Fromm, faisait à cette occasion les réflexions suivantes dans l’Univers :

La question de savoir si telle ou telle personnalité sera regardée comme digne d’avoir accès dans les appartements de Léopold Ier ou de s’asseoir sur un tabouret dans l’ancien salon de Marie-Thérèse nous touche fort peu. Ce serait tout au plus une question intérieure autrichienne, du ressort d’un chambellan de la cour de Vienne, plutôt que d’un journal de Paris. Ce qui nous occupe ou préoccupe, c’est le fait que M. Koloman Tisza a obtenu de son souverain un tabouret à la cour pour reconnaître « les mérites d’un banquier en ce qui concerne le développement du crédit national de la Hongrie » ; c’est surtout que M. Tisza s’en fasse honneur dans son journal officieux.

Regardons donc de près quels sont les mérites payés ainsi avec un tabouret ; peut-être en concluera-t-on que ce petit meuble fait en Autriche une brèche plus grande que le canon de Wagram ou celui de Sadowa.

La Hongrie, avec tous les pays qui en dépendent, compte 15 millions 642.102 habitants. En 1885, elle a dépensé la somme colossale de 487.162.180 florins. De plus elle avait, non compris la part de la Hongrie dans les dettes communes de la monarchie austro-hongroise, une dette totale de 1.461.009.391 florins, ainsi qu’il résulte des données officielles publiées par l'Almanach de Gotha.

Or, en 1873, les dépenses annuelles de la Hongrie n’étaient que de 169.110.719 florins ; son budget a donc triplé dans l’espace de