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à des dates fixes suivant diverses combinaisons. C’est grâce à cela que les États-Unis ont pu se débarrasser de la plus grande partie de l’énorme dette qu’ils avaient contractée pendant la guerre de Sécession.

Même là où la dette est perpétuelle, sa proportion à la richesse publique est une chose de grande importance. En Angleterre, où son capital représente seulement le 7 p. 100 (ou le 10 p. 100 en y comprenant les dettes des localités) de l’ensemble de la propriété et où d’ailleurs les taxes de consommation ne sont pas la base principale du budget (chap. xiii, § 8), M. Giffen peut soutenir qu’elle n’est qu’un mode de distribution de la propriété et non une charge pour les contribuables. Mais, ainsi qu’il le dit lui-même, en France, où la dette publique n’est pas moindre du 17 p. 100 de la valeur de la propriété totale, elle retombe forcément en grande partie sur les travailleurs de tout rang, auxquels on demande par des impôts assis sur les consommations ou l’exercice des industries le milliard et demi nécessaire à son service[1]. Partout où l’on demande trop au contribuable, on recourt fatalement à de mauvaises taxes, ainsi que l’a dit Stuart Mill.

III. — Les émissions de rentes perpétuelles ont l’inconvénient de faire profiter sans travail actuel leurs acquéreurs de la plus-value qu’elles prennent au fur et à mesure que la fortune de l’État emprunteur se raffermit.

Les souscripteurs de l’emprunt 5p. 100 français émis en 1871 à 82 francs 50 ont pu le revendre en 1881 à 120 francs, bénéficiant ainsi d’une plus-value de 33p. 100 en capital. C’est, semble-t-il, une constitution de richesses sans cause[2].

Ce n’est là toutefois qu’une face de la question. La plus-value

  1. The Growth of capital, pp. 140-141.
  2. La question est toute différente s’il s’agit de la plus-value d’actions d’entreprises industrielles, comme le canal de Suez et nos chemins fer. Cette plus-value-là, en effet, est due en partie à l’augmentation de la productivité de l’entreprise, c’est-à-dire des services effectifs qu’elle rend : elle est contrebalancée par les pertes de capitaux dans les entreprises qui ne réussissent pas ; mais la partie la plus considérable de leur plus-value est due au changement dans le taux de capitalisation (chap. ii, § 5).