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la Chambre syndicale et au-dessous duquel aucun membre n’opère. Ce tarif est sensiblement élevé au-dessus de celui auquel la concurrence le fixerait ; mais cette surcharge imposée au public est compensée par les garanties qu’offre la Corporation. Tout ce que nous pouvons dire dans ce chapitre sur les abus et les brigandages qui se produisent à la Bourse ne doit pas faire perdre de vue la légitimité et la nécessité d’un très grand nombre des transactions qui s’y opèrent. La Corporation des agents de change maintient en somme à la Bourse française la sécurité et l’honorabilité dont ont besoin ceux qui y viennent pour faire des affaires sérieuses, non pour y jouer ou y agioter. Elle est devenue une puissance capable de rendre au marché financier de grands services. Ainsi le 10 janvier 1891 la Chambre syndicale versa à elle seule 453 millions comme garantie du premier versement sur l’emprunt de 869 millions émis ce jour-là. Elle remplit, on le voit, un rôle fort utile pour le succès des émissions et le classement des emprunts. La Chambre syndicale serait même, dans les moments de crise suprême, en état de soutenir le marché financier et de remplir à peu près le même rôle que la Banque de France pour le marché commercial, si trop souvent les membres de la Corporation ne s’engageaient pas eux-mêmes dans des opérations de jeu, qui les rendent tous les premiers victimes de ces crises, et si d’autre part la Haute-Banque n’avait pas la main dans la plupart des charges, parce qu’elle a fourni à leurs titulaires le fonds de roulement nécessaire pour les exploiter.

Les agents de change ont évité de compromettre leur monopole légal en le défendant trop rigoureusement, ce qui eût amené le gouvernement à augmenter le nombre de leurs charges. Il est toujours de soixante comme en 1723 ! Après avoir en 1859 obtenu une dernière fois des condamnations judiciaires contre les coulissiers, les agents de change ont eu depuis cette époque la sagesse de faire l’abandon d’une partie de leurs courtages aux remisiers, qui leur apportent des affaires et suppléent à leur petit nombre, et surtout de laisser s’élever à côté