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Cette solution, qui peut surprendre les personnes étrangères à la science du droit, est parfaitement juridique : elle montre comment l’application des lois sur les accaparements est impossible pratiquement. Puisqu’après coup la justice ayant en mains tous les contrats, livres et correspondances, ne peut pas établir le délit, comment pourrait-elle le saisir au cours des opérations ? C’est cependant à ce moment-là qu’il faudrait intervenir ; car en pareille matière surtout prévenir vaudrait mieux que réprimer. Mais, encore une fois, c’est impossible et l’insignifiance, l’irrégularité de la répression pénale, qui ne frappe que des hommes déjà tombés, ajoute au discrédit de la loi.

Les faits qui se sont produits dans l’administration du Comptoir d’escompte accusent les lacunes de notre législation sur les sociétés anonymes (chap. v, § 10). Quant aux naïfs et aux cupides, qui ont tenté la fortune en mettant dans le jeu de la Société des Métaux alors que la presse leur signalait chaque jour les aléas formidables de cette aventure et prédisait la catastrophe finale, on peut dire que leur sort est mérité. Ils sont moins intéressants que les industriels qui, employant le cuivre pour leur fabrication, ont été pris dans ces alternatives de hausse et de baisse, comme dans un engrenage où ils ont été broyés.

XIII. — Il est frappant de voir combien ces spéculateurs audacieux, et même les puissants financiers qui les appuiaient au moins au début, sont ignorants des faits de l’histoire économique capables de les éclairer sur l’issue fatale de leurs entreprises.

Il n’y a pas plus d’un demi-siècle, en 1837, Biddle, le directeur de la Banque des États-Unis, dont le monopole d’émission venait seulement de cesser, avait organisé sur les cotons,