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qu’un produit aussi répandu dans la nature que l’est le cuivre puisse jamais faire l’objet d’un monopole universel. Ceux qui, dès le premier jour, prédisaient l’échec final de cette entreprise, quelques proportions qu’un syndicat international lui eût données, étaient dans le vrai.

Il est un côté de cette gigantesque opération sur lequel la lumière ne sera jamais faite complètement : ce sont les spéculations auxquelles ont donné lieu les titres de la Société des métaux et les actions des diverses sociétés minières. Les avocats des principaux inculpés, Secrétan et Laveissière, ont bien établi que les pertes et les gains de leurs clients sur les actions de la Société des métaux et des diverses mines qu’ils détenaient s’étaient à peu près balancés ; du reste ils sont sortis pauvres personnellement de ces folles aventures, comme Law et Bontoux. Mais qui dira jamais les gains réalisés à la Bourse au moyen des marchés à terme sur toutes ces valeurs par les membres du syndicat financier et par leur clientèle ? On en pourra juger par les variations extrêmes des cours de quelques-unes d’entre elles. L’action de la Société des métaux, qui était à 400 fr. en juillet 1886, a fait 1.220 francs en mars 1888. Le Rio-Tinto, qui en octobre 1886 valait 260 francs, est monté à 535 fr. en janvier 1888 et ainsi de toutes ces valeurs à proportion.

Ce qui est plus facile à établir, c’est la ruine des actionnaires des deux compagnies lancées parleurs directeurs dans cette voie insensée. La Société des métaux avait doublé en mars 1888 son capital de 25 millions par l’émission de 50.000 actions nouvelles de 500 fr. émises à 750 francs. Tout ce capital a péri et les 40.000 obligations de 500 francs émises en 1881 valent à peine 220 francs dix ans après. Quant au Comptoir d’escompte, les experts, dans leur rapport du 29 avril 1889, ont fixé les pertes éprouvées dans l’affaire des cuivres à 155 millions, auxquels il fallait ajouter une perte de 22 millions résultant des opérations qu’on avait continuées sur les étains. Ce grand établissement, qui avait un caractère semi-officiel, a dû entrer en liquidation. Ses actions, qui valaient