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qu’au jour le jour. Les usines qui traitaient le cuivre étaient souvent en perte sur leurs fabricats, par suite de la baisse constante de la matière première. Elles ne pouvaient se protéger qu’en vendant elles aussi à terme pour se couvrir par une sorte d’assurance (chap. vii, § 12).

La campagne de spéculation faite par les détenteurs du stock de Londres était à l’inverse de la situation réelle des choses ; car les traitements sulfuriques des vignes et le développement des applications de l’électricité augmentaient évidemment les emplois industriels du cuivre. Dans ces conditions, Secrétan entreprit de créer à Paris un marché des cuivres rival de celui de Londres. Il s’assura la disposition d’un fonds montant à 62.737.500 francs, fournis par un syndicat de grands banquiers, dont faisaient partie entre autres M. Bamberger, la Banque de Paris et des Pays-Bas, M. Joubert, M. Lécuyer, M. Hentsch[1].

Avec cette base d’opérations, Secrétan donna ordre à ses agents à Londres d’acheter tant en disponible qu’à terme. Il

  1. Ce syndicat de banquiers, d’après les correspondances versées au dossier, paraît avoir été seulement un groupe de donneurs de crédit à raison de 7 p. 100. Il n’a pas été établi qu’ils eussent en outre en cette qualité une part dans les bénéfices. La préoccupation d’éviter la constitution d’une coalition au sens juridique du mot était très grande chez les promoteurs de l’opération. A la fin de 1887, un journal ayant révélé cette combinaison, Secrétan écrivait cette lettre qui a été produite aux débats : « Il n’y aura pas de syndicat ni de signatures. Mais les choses n’en seront que plus solides ; car désormais nous marcherons sans craindre aucune indiscrétion, aucune bêtise, aucune trahison. » A ce moment-là, M. de Rothschild se retira du groupe des bailleurs de fonds ainsi que la Société générale et le Crédit industriel. Cependant il continua à s’intéresser à l’affaire. En janvier 1889, il prêta 12 millions à la Société des métaux. En outre, au 4 janvier 1889, un compte à tiers entre MM. de Rothschild, la Banque de Paris et des Pays-Bas et le Comptoir d’escompte ouvrit un crédit de 21 millions à la Société des Métaux. M. André Girod paya au mois de janvier 1889 245.000 francs pour elle. Le 15 février, M. Hirsch lui prêta 2 millions, le 16 février 14 millions, le 17 février 9 millions, soit 25 millions en trois jours. Il y avait aussi un certain nombre de bailleurs de fonds anglais, dont était la maison Baring.