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A Paris, l’usage des deposits et des marges n’a pu s’établir par suite de la résistance des intéressés. La Banque commerciale et industrielle a bien établi à la Bourse du commerce une caisse de garantie pour les affaires à terme ; mais les règlements des divers marchés (farines, grains, huiles, alcools, sucres) ne rendant pas les dépôts et les appels de marge obligatoires, un petit nombre de contrats seulement sont enregistrés par elle. Il est fâcheux que la place de Paris reste réfractaire à l’introduction d’une institution aussi utile[1].

XIV. — Une caisse de liquidation bien administrée régularise en effet les affaires à terme et en écarte les parasites ; car quand elle est acceptée par les principaux négociants, personne ne peut plus faire d’opérations à terme sans passer par son intermédiaire[2]. Elle est également à même d’empêcher ce qu’on appelle l’étranglement du marché qui se produisait lorsqu’un gros spéculateur achetait par ses courtiers toutes les filières en cours. Toutes les affaires sont désormais enregistrées et connues journellement du public.

Mais quand une institution de ce genre est, en fait, aux mains de spéculateurs sans scrupule qui la font gérer par des prête-noms dans leur intérêt exclusif, ils peuvent s’en servir pour exagérer leurs propres spéculations et écraser leurs adversaires d’autant plus facilement que, par le mouvement de la caisse, ils connaissent leur jeu. C’est ce qui est arrivé à Hambourg en 1888, et à Magdebourg en 1889. Après un agiotage effréné sur les cafés, puis sur les sucres, ces caisses ont dû, chacune, atermoyer la liquidation de toutes les opérations. [fin page270-271]

  1. Ces caisses sont créées par l’initiative des corporations commerciales qui existent dans tous les grands centres sous une forme ou sous une autre (§ 8). Elles se constituent sous la forme d’une société par actions ; la caisse bénéficie en effet de certaines commissions. Les actions de la Caisse de liquidation du Havre, émises à 1.000 fr., ont valu un moment 2.300 fr. Elles valent en 1891 1.900 fr., et ont touché un dividende de 137 fr. 80.
  2. C’est là au moins le but que se proposent les corporations commerciales qui créent ces caisses ; mais comme des personnes étrangères à la ville peuvent en user par l’intermédiaire d’un courtier qui agit alors comme commissionnaire, il faut une grande surveillance sur les courtiers de la part du conseil de direction de la caisse pour que ce but soit atteint. Au Havre, on spécule de tous les points du monde sur les cafés par l’intermédiaire des courtiers agréés par la caisse. Des plaintes très vives se sont élevées sous ce rapport contre le fonctionnement de la Warenliquidation Kasse de Hambourg.