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Tels sont les arbitrages divers qu’on peut faire soit sur la même place en revendant immédiatement à terme une quantité égale de marchandises qu’on a achetée pour l’importation de manière à s’assurer un prix, — soit sur les qualités différentes de la même marchandise, quand un écart anormal se produit entre elles ; on revend la marchandise achetée et on rachète la marchandise vendue au moment où l’écart des prix aura diminué ou augmenté de manière à gagner plus d’un côté qu’on ne perd de l’autre, — soit en faisant des ventes et en les rachetant sur des mois successifs, quand on juge l’écart des cours exagéré entre les époques, — soit encore en achetant à terme sur une place et en revendant sur une autre, quand il y a entre les cotes locales des écarts supérieurs aux frais de transport, — soit enfin en combinant un ou plusieurs de ces arbitrages[1].

Dans tous ces cas, fait justement remarquer M. Olivier Senn, le spéculateur ne pousse ni à la hausse ni à la baisse. Ses opérations tendent au contraire, par l’action réflexe qu’elles ont sur les cours, à les régulariser[2]. « Tous les arbitrages, ajoute-t-il, présentent plusieurs caractères : pluralité des opérations simples qui composent l’arbitrage, faible proportion des pertes et des bénéfices relativement à l’importance totale des transactions, nécessité d’une abondance d’informations et d’une précision d’exécution telles que les commerçants de profession seuls peuvent les entreprendre. » C’est dans ces opérations que s’accuse la supériorité du commerçant habile et instruit. Autrefois, les arbitrages n’étaient pratiqués que

  1. Etude sur les marchés à terme en marchandises, pp. 185 et suiv., et David Cohn.op. cit., pp. 25 et 104-106.
  2. Tel est l’effet de l’opération suivante indiquée par M. A. Raffalovich, Nouveau dictionnaire d’économie politique, v° Arbitrage : « Un négociant de Breslau achète du seigle en Silésie ; pour s’assurer un prix favorable il vend à livrer ; son débouché direct serait Danzig ou Kœnigsberg ; en étudiant la cote, il voit que le seigle est coté à Amsterdam à un prix supérieur à celui qui y a cours ordinairement en comparaison de Danzig. Il vend son seigle à Amsterdam à terme et lorsque l’expédition s’en fera pour Danzig, il rachètera à Amsterdam et vendra à Danzig. Il aura même pu acheter à Danzig, où il compte expédier sa marchandise. En fin de compte, l’opération étant défaite par rachat, revente et livraison, elle aura eu pour conséquence d’amener des offres de seigle à Amsterdam, où le prix était élevé, et de faire des achats à Danzig, où le prix était bas. »