Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/267

Cette page n’a pas encore été corrigée

dollars, en déclarant que décidément il n’avait pas la bosse des affaires !

Néanmoins, on ne saurait nier qu’il n’y ait souvent des répercussions fâcheuses sur le producteur ; seulement elles sont généralement temporaires, et la baisse exagérée se produit surtout pour lui à la suite des débâcles des corners ou tentatives d’accaparement (chap. viii, § 2).

VI. — Pour que le marché soit alimenté, pour qu’un courant constant de transactions assure l’amplitude et la régularité de l’approvisionnement, il faut bien qu’il y ait des haussiers et des baissiers, c’est-à-dire des personnes qui envisagent d’une manière différente les perspectives de variation des prix de la marchandise. L’individualité du jugement de chaque homme, la justesse et la rapidité de conception plus ou moins grande, la différence même de tempérament font qu’avec des éléments d’information identiques les spéculateurs prennent des positions différentes, les uns croyant à la hausse, les autres à la baisse. C’est ainsi qu’ils se fournissent réciproquement des contreparties. Les acheteurs à terme sont forcément des spéculateurs à la hausse. Ils sont intéressés à ce que la marchandise, à l’époque où ils doivent en prendre livraison, ait augmenté de valeur. En sens inverse, les vendeurs à terme sont forcément des spéculateurs à la baisse : ils sont intéressés à ce que la marchandise ait moins de valeur au moment où ils devront l’acheter eux-mêmes pour en faire livraison[1]. Sans discuter ici le point de vue des gouvernements, qui ont de tout temps considéré les baissiers sur les fonds publics comme des ennemis, il est certain que cette appréciation ne saurait s’étendre aux spéculateurs engagés à la baisse sur les blés, les cotons ou toute autre marchandise. Ils pourraient au besoin

  1. La réciproque n’est pas vraie : les vendeurs ne sont pas toujours des haussiers et les acheteurs toujours des baissiers. Le vendeur peut être un haussier qui réalise et l’acheteur un baissier qui se couvre. En réalité, les opérations à terme amènent toujours à un moment des opérations en disponible en sens inverse et les unes et les autres maintiennent le marché en équilibre. (V. David Cohn, Der Getreide Terminhandel, p. 111.)