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Caucase et bientôt celui de l’Inde viennent faire concurrence sur tous les marchés du monde aux exploitations de la Pensylvanie et de la Galicie. Seule, la propriété urbaine fait exception. Mais à toutes les difficultés pratiques d’une taxe des logements, — il y en avait parfois au moyen âge, — s’ajoute le grave inconvénient qu’il y aurait à attirer encore davantage les populations rurales dans les villes par une baisse artificielle des loyers (chap. iv, § 2).

La constitution d’un monopole factice par la coalition des intéressés a toujours été considérée, à Rome[1], au moyen âge[2] et dans les temps modernes, comme contraire à l’ordre public. Partout la souveraineté s’est réservé le droit de constituer des monopoles quand des raisons de police ou de bonne administration lui paraissent le rendre nécessaire, et, dans ce cas, elle fixe les prix auxquels ceux qui jouissent de ce monopole pourront vendre leurs produits et leurs services.

Malgré la prohibition légale des monopoles privés, les accaparements commerciaux paraissent avoir été assez fréquents dans l’ancien régime. Au moins incriminait-on comme telles des opérations de spéculation qu’une meilleure connaissance des faits économiques nous ferait peut-être regarder comme légitimes, si à distance nous pouvions connaître exactement les faits (chap. viii, § 1).

Les moralistes anciens ont discuté beaucoup pour savoir si le fait de constituer un monopole était par lui-même — indépendamment de la violation de la loi positive, — contraire à la justice. Ils résolvaient la question par la négative, pourvu que les prix ne fussent pas portés au delà du summum justum pretium ; or par justum pretium il fallait, disaient-

  1. V. Code Justinien, de Monopoliis et conventu negotiatorum illicito vel artificio ergolaborum nec non balneatorum prohibitis et pactionibus illicitis. Cf. Suétone, Vita Tiberii, cap. 30.
  2. V. les textes recueillis par Du Cange, Glossarium, v° Monopolium. La reconnaissance du principe est d’autant plus remarquable que, par suite de l’inféodation d’une foule de professions et de commerces, les monopoles légaux étaient extrêmement multipliés au moyen âge et dans l’ancien régime. V. Marquard, de Jure mercatorum (Francfort, 1662), liv. iv, chap. vi et vii.