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Une sorte de hiérarchie s’est établie entre ces marchés. Au-dessus de ceux qui recueillent les denrées près des lieux de production s’élèvent des marchés que leur situation géographique fait des centres de distribution. On les appelle marchés régulateurs, parce que c’est là que les prix se nivellent et que la distribution s’opère par des ordres envoyés aux marchés secondaires. C’est ainsi qu’en Europe le marché des blés et des farines s’est établi à Londres, au Havre, à Paris, à Marseille, à Odessa, à Manheim, à Romanshorn et autres villes du lac de Constance où viennent aboutir les lignes ferrées l’Europe centrale. Le marché des cotons s’est fixé à Liverpool, à Brème et au Havre ; celui des cuivres et des métaux précieux à Londres ; celui des fontes en Angleterre, à Glascow et à Milddleborough ; celui des soies à Lyon, à Milan et à Londres ; celui des cafés à Amsterdam et au Havre ; celui des laines à Londres et à Anvers ; celui des sucres à Hambourg, à Magdebourg, à Amsterdam, à Paris ; celui du pétrole à Brème, etc. Cette organisation assure une économie considérable de forces et de temps aux commerçants et aux industriels. Parmi ceux-ci, quelques-uns, les plus grands, trouvent cependant avantage à s’approvisionner directement aux lieux de production. Mais c’est l’exception.

Les grandes foires du moyen âge, dont aujourd’hui encore celle de Nijni-Novogorod demeure un spécimen si intéressant, étaient comme des ébauches de cette organisation. Les marchés modernes sont des foires permanentes et spéciales. Des procédés commerciaux particuliers et une organisation appropriée s’y sont développés[1].

  1. Une monographie historique du commerce des céréales mettrait en évidence les principaux traits de cette grande transformation.

    Le prix des blés et des farines tend de plus en plus à se niveler sur tous les marchés, — sauf la différence résultant des droits de douane et des frais de transport, — par l’action du commerce international.

    Le système des réserves particulières a disparu complètement. L’on ne voit plus, comme il y a cinquante ans, des propriétaires s’enorgueillir d’avoir trois récoltes dans leurs greniers. Les plus à leur aise vendent graduellement ou tout au plus attendent le printemps, selon un ancien usage, qui du reste ne répond plus à la réalité des faits ; car les récoltes de l’Australie et de la Plata arrivent en janvier et février sur nos marchés. En tous cas, avant la nouvelle