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Les deux derniers points sont du domaine de la conscience individuelle. Nous avons à déterminer ici seulement les règles de la justice commutative dans les affaires.

II. — Les régies que nous allons résumer s’appliquent aussi bien aux échanges conclus directement entre producteurs et consommateurs qu’à ceux faits par les commerçants de profession. Il n’y a pas à ce point de vue de distinction essentielle entre ces deux classes. Le consommateur dans ses achats et le producteur dans ses ventes cherchent chacun à faire une bonne affaire, tout comme le commerçant. Ce dernier seulement fait de l’échange sa profession principale.

L’essence du commerce est d’acheter en vue de revendre, ce qui comporte essentiellement la spéculation, c’est-à-dire la prévision de la hausse ou de la baisse des prix. Il devient une fonction spéciale dans toute société qui sort de l’état rudimentaire. Transporter les produits, les distribuer en détail au fur et à mesure des besoins des consommateurs, entretenir d’une manière constante des approvisionnements dans des centres où consommateurs et producteurs trouvent à leur moment et abondamment, soit les subsistances, soit les matières premières de leur industrie, voilà le triple service que rend le commerce et qui justifie ses gains.

Non seulement le commerçant recueille les produits épars chez les agriculteurs ou les artisans disséminés ; mais encore il les classe selon leurs qualités, il les assortit, leur fait parfois subir une dernière préparation répondant aux habitudes du consommateur, toutes choses qui ne sont pas indifférentes ; car c’est ce qui en fait des produits marchands, selon l’expression courante.

Quelque élevés que les gains du commerce aient pu être à certaines époques (§ 6), ils sont toujours très inférieurs aux dépenses que les consommateurs auraient eu à faire pour se procurer directement les produits. La concurrence les réduit de plus en plus ; mais en soi ils ont une cause parfaitement légitime, quand même le commerçant n’a ajouté aucune élaboration au produit et ne l’a pas transporté lui-