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notamment parce que les opérations critiquées étaient l’œuvre du conseil d’administration tout entier agissant dans la sphère de ses attributions statutaires et étaient susceptibles seulement de donner lieu à des réparations pécuniaires[1].

En Angleterre, le rôle de ces syndicats malfaisants est rempli par des Shares trust Campanies, qui, sortant de leur rôle naturel (§ 1) et sous prétexte d’offrir à leurs actionnaires une capitalisation moyenne de certains genres d’entreprises, favorisent la formation de nouvelles compagnies, en prenant à l’émission une partie notable de leur capital et en s’efforçant d’écouler le reste dans le public[2].

Cependant, ces manœuvres ne réussissent pas toujours, et nos grandes sociétés financières sont toutes chargées de gros paquets de titres qu’elles ne pourraient réaliser sans déprimer les cours et qui immobilisent dangereusement leurs ressources.

Dans la liquidation du Crédit général français, on trouve 4.319 actions des Aciéries de France ; en décembre 1890, le liquidateur les vend en bloc à 925 francs. Ce titre, qui avait été poussé à 1.400 tombe à 1.000. On trouve encore, dans le portefeuille de cette même société, 12.967 actions de la Société immobilière, 7.166 actions des Plâtrières du bassin de Paris, 1.425 actions des Tramways de Saint-Etienne. La Société immobilière, une de ces sociétés de spéculation sur les terrains dont nous avons parlé (chap. iv. § 12), avait 13.000 actions ; 33 seulement étaient dans les mains du public en décembre 1890 et la société a fonctionné quand même pendant des années !

X. — Souvent, une fois la société lancée, les fondateurs se dérobent et la font gérer par un directeur, qui est

  1. Un arrêt de la Cour de cassation du 16 avril 1870 a posé le principe de la responsabilité des administrateurs envers les acheteurs d’actions pendant la période d’illusion créée par un rapport inexact. Il a été jugé que la période d’illusion cesse et que leur responsabilité disparaît, alors que la vérité a pu être connue ou supposée par le public par suite de la chute des cours.
  2. V. dans the Economist du 9 août 1890, Trust companies as promoters ; 11 juillet 1891, the Rationale of trust companies, et 14 novembre 1891, Terminable debentures ; 30 janvier 1892, later phases of the Trust crazes.