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nombre des nouvelles fondations à 162. En 1889, année de reprise, il s’est formé 360 nouvelles sociétés.

La Haute-Banque et les sociétés financières poussent à la multiplication des sociétés anonymes parce que l’émission de leurs actions et la hausse qu’elles en espèrent sont pour elles la source de profits bien supérieurs à ceux des opérations ordinaires de banque. Aux États-Unis[1], comme en Angleterre[2], on a constaté dans ces dernières années que la Haute-Banque était en grande partie responsable de la transformation en sociétés anonymes de nombreuses entreprises, qui auraient très bien pu continuer sous le régime de la propriété individuelle, en partnership ou en commandite.

Les lois française et anglaise[3] n’imposent aucune responsabilité spéciale, en dehors du cas de fraude personnelle ou de manœuvres dolosives[4], aux banques, qui lancent une émission, ni aux journaux qui la recommandent. La loi allemande du 28 juin 1884 a fort justement étendu cette responsabilité. Une banque devra désormais apporter la diligence d’un homme d’affaires soigneux à vérifier les allégations des prospectus qu’elle offre à sa clientèle. Néanmoins, quoique sur d’autres points la loi allemande ait été assez efficace, de 1887 à 1890 la Haute-Banque de Berlin s’est livrée à une campagne sur les actions des mines et des sociétés métallurgiques, qui a eu pour résultat de faire hausser tous ces titres de 100 à 150 pour 100, sans que l’augmentation de

  1. Voy. the Economist, 10 décembre 1887 et 14 janvier 1888.
  2. Ce mouvement s’accuse par des chiffres considérables. En avril 1884, il y avait en Angleterre 8.692 joint stock companies ayant un capital payé total de 475.551.294 liv. st. En avril 1891, leur nombre était de 14.873, avec un capital payé de 891.504.512 liv. st. (The Economist, 14 novembre 1891).
  3. Une décision du comité judiciaire de la Chambre des Lords a débouté de sa demande en dommages-intérêts un malheureux souscripteur aux actions de la Plymouth, Davenport and districts C° contre les directeurs signataires d’un prospectus, qui vantaient les avantages de la traction à vapeur sur les routes, alors que l’autorisation de l’employer n’avait pas été obtenue. En rendant ce jugement, lord Herschell exprimait le désir qu’une loi spéciale vînt combler la lacune de la Common Law (the Economist, 6 juillet 1889). En 1890, un bill a été présenté dans ce but, director’s liability bill. Après avoir été voté par les Communes, il a échoué devant le comité judiciaire des Lords à cause des difficultés techniques du sujet. Il sera vraisemblablement repris.
  4. V. Deloison, Traité des valeurs mobilières (Larose et Forcel, 1890), n°523, notes.