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fermage de certains impôts[1]. Les luoghi des monti, ou les titres de rentes des emprunts émis par les gouvernements de la péninsule, dès le xive siècle, ont été le vrai type de l’action. Dès cette époque, à Florence à Gènes, à Milan, ils jouaient dans les fortunes des particuliers le même rôle que les valeurs mobilières d’aujourd’hui et donnaient lieu aux mêmes transactions de Bourse. Au xvie siècle, l’on divisa les fonds des commandites en parts uniformes dans les villes d’Italie et du midi de l’Allemagne. La société anonyme se constituait ainsi par des essais successifs, comme pour fournir leur cadre aux grandes entreprises coloniales et maritimes que les Européens allaient entreprendre. En 1599, la reine Elisabeth remettait au duc de Cumberland et à ses associés la première charte de la Compagnie des Indes orientales. En 1602, la Compagnie hollandaise des Indes était fondée et la France essayait d’en créer une sur les mêmes bases. Toutes les grandes compagnies de commerce instituées dans le cours du siècle furent organisées sur le même type ; puis, peu à peu, on appliqua cette forme de société à d’autres entreprises[2]. En France, la première compagnie d’assurances maritimes par actions fut créée en 1664. En Angleterre, dans la seconde moitié du dix-huitième siècle, certaines banques, les assurances, les canaux, les services d’adduction des eaux dans les villes étaient déjà organisés en compagnies par actions, et Adam Smith constatait que, pour ce genre d’affaires, ce régime était le seul possible. Mais on demandait aussi au Parlement des chartes pour des entreprises d’un tout autre caractère, comme le traitement du cuivre et du plomb, la fabrication des glaces, etc.

D’après le droit commun de l’Europe, la constitution d’un

  1. Notamment dans l’État romain sous Paul IV, 1555 à 1559. V. Straccha, Decisiones rotæ Genuæ, decis. XIV, nos 5, 6, 83, 85, 133.
  2. Quelques-unes de ces compagnies étaient des commandites par actions plutôt que des sociétés anonymes proprement dites. V. Savary, Dictionnaire du commerce (1re édit. 1675), ve Compagnies. Pour éviter toute méprise, il faut bien faire attention que, dans notre ancienne jurisprudence, on donnait le nom de société anonyme aux affaires en participation et aux commandites simples sans raison spéciale. V. Troplong, du Contrat de société, t. I, p. 425.